Le virus Y et sa propagation
Le virus Y de la pomme de terre se transmet par les pucerons ailés qui, visitant les cultures, pratiquent des piqûres dites « d’essai » visant à vérifier si la pomme de terre convient bien à leur alimentation. Au cours d’une piqûre d’essai, le puceron absorbe une très petite quantité de suc cellulaire mais aussi les particules virales si elles sont présentes dans les cellules sondées. Les particules virales absorbées peuvent être aussitôt transmises par le même processus à une autre plante. Ces processus d’acquisition et de transmission des particules virales sont rapides et multiples si bien qu’ils rendent difficile le contrôle de la dissémination du virus Y en champ. En utilisant la machinerie des cellules végétales pour se multiplier et circuler dans la plante, le virus provoque des dysfonctionnements pouvant altérer fortement le rendement et la qualité des tubercules.
Les tubercules contaminés, lorsqu’ils sont replantés, vont développer des plantes au potentiel affaibli, pouvant servir à leur tour de source de contamination. Selon la souche de virus Y, l’importance de l’infection au niveau de la parcelle, la sensibilité de la plante, voire les conditions climatiques dans lesquelles il se développe, les pertes de rendement peuvent aller jusqu’à plusieurs dizaines de pourcents. De plus, il existe une souche particulière du virus Y provoquant des nécroses sur les tubercules, rendant impossible leur commercialisation.
Depuis de nombreuses années cette problématique est étudiée au sein du service pomme de terre du CRA-W et les différentes activités menées sur le sujet lui ont permis de cerner correctement son importance et de proposer des solutions aux producteurs de plants de pomme de terre.
La participation au programme officiel de contrôle et certification des plants de pommes de terre, notamment en procédant aux analyses de laboratoire de l’ensemble des plants produits en Belgique, permet au CRA-W d’avoir une vue globale de la situation. Selon l’année, 30 à 80% des lots de plants présentés au contrôle sont infectés par le virus Y, ce dernier étant responsable de 95 à 98% des déclassements ou refus des lots après analyse. Il représente donc bien un véritable problème en pomme de terre et on peut dire, dans ces conditions, qu’il serait pratiquement impossible de produire de la pomme de terre de consommation sans l’organisation de ce programme de contrôle qui maintient les effets du virus à un niveau acceptable.
Surveillance et monitoring de l'activité des pucerons propagateurs
La relation entre l’activité des pucerons ailés en saison de culture et la qualité des plants a été démontrée. Aussi, nous avons développé un suivi de cette activité grâce au piégeage des pucerons dans les deux seuls pièges à aspiration en activité en Belgique (Libramont et Gembloux). Les données obtenues sont transmises aux producteurs de plants chaque jour en saison.
Des études épidémiologiques ont clairement montré que les sources de contamination au sein des parcelles de production constituent l’origine principale de la dissémination du virus. Pratiquement, cela signifie que les producteurs de plants doivent choisir avec attention les lots de plants qu’ils destinent à la multiplication.
Les pistes de protection
Différentes stratégies de protection des cultures ont été étudiées. Il ressort de ces études que, paradoxalement, les insecticides ne sont pas très utiles pour limiter la dissémination du virus Y dans les parcelles de multiplication contrairement à l’utilisation des huiles minérales paraffiniques. D’autres produits ont été testés sans succès ou avec une efficacité plus faible : les huiles végétales et les macérats de plantes notamment. Certaines pratiques agronomiques ont été validées, soit le défanage le plus hâtif possible des cultures de multiplication ou l’épandage de paille au sol destiné à perturber l’orientation des pucerons dans la recherche de leur substrat végétal.
L’utilisation de ressources génétiques adaptées dans les programmes d’amélioration, c’est-à-dire celles issues de variétés possédant des gènes de résistance constitue une solution efficace. Par exemple, l’utilisation de la variété Gasore possédant un gène de résistance au virus Y (Rysto) dans notre programme d’amélioration a permis l’obtention d’une variété, Louisa, totalement résistante au virus.