SoilVeg est un projet européen innovant qui s’intéresse à des systèmes sans travail du sol en production de légumes biologiques. L’objectif est d’améliorer la conservation des sols et l’utilisation des ressources fossiles grâce à l’utilisation et la gestion de plantes de services.
Les systèmes sans travail du sol peuvent utiliser la technique du Rouleau cranteur (ou faca) pour stopper la croissance de couverts végétaux avant la mise en place des cultures. Cette technique a démontré son potentiel pour la qualité des sols et le maintien de sa fertilité, l’amélioration de la biodiversité et l’économie d’énergie. C’est pour cette raison que les agriculteurs bio s’intéressent à cette approche à travers le monde. De plus, ce système sans travail du sol peut réduire le risque de pertes de nutriments dans le système sol/plante et l’émission par les sols de gaz à effets de serre, avec des bénéfices pour toute la société.
Cependant, l’introduction de techniques sans travail du sol est un vrai challenge qui s’accompagne souvent d’une diminution des rendements, notamment dans les pays d’Europe du nord, où les conditions pédo-climatiques peuvent contrarier la mise en oeuvre de la technique.
Les premiers résultats obtenus à mi-parcours du projet sont les suivants:
- Le choix des espèces utilisées pour les couverts et les densités de semis sont des éléments clés pour optimiser la technique du rouleau cranteur. En effet, la qualité d’implantation des couverts, et les risques de repousses après roulage sont des points critiques. Les matériels utilisés pour détruire le couvert et pour installer les cultures doivent être calibrés et adaptés aux conditions spécifiques des sols dans lesquels ils sont utilisés ;
- Nous avons en général observé une baisse des rendements dans les modalités avec couverts couchés par rapport aux modalités avec couverts broyés et enfouis dans le sol (conduite engrais vert) ou témoins sans couverts. La diminution de rendement varie de 10 à 50% par rapport aux témoins ;
- Les systèmes racinaires sont en général plus développés, en largeur comme en profondeur, dans les modalités où le sol est travaillé ;
- Les premiers résultats n’ont mis en évidence aucune différence significative de disponibilité des éléments nutritifs, mais un impact positif des systèmes avec couverts couchés (et travail du sol limité au strip-till)
sur les paramètres microbiens, indicateur important de la qualité des sols ; - Globalement, les populations d’adventices dans la culture étaient significativement inférieures dans les modalités couverts couchés ;
- Les communautés d’adventices installées dans les modalités sol travaillé étaient caractérisées par les annuelles, qui sont plus compétitives (taille et surfaces foliaires plus importantes) et fleurissent pendant plus longtemps ;
- Les modalités avec couverts couchés ont favorisé les communautés de prédateurs du sol : les densités de carabes, staphylins, et dans certains pays les araignées, étaient plus importantes que dans les modalités
engrais verts où le couvert est incorporé par le travail du sol ; - La consommation d’énergie par unité de surface a été en moyenne réduite de 20% sur les modalités avec sol non travaillé (couverts couchés);
- Deux modèles de simulation de l’émission de gaz à effet de serre sont utilisés, EPIC et Daycent. Ils ont été adaptés et validés pour les systèmes de culture de légumes sans travail du sol. Les prédictions annuelles des dynamiques du carbone et de l’azote du sol par les 2 modèles ont donné les mêmes tendances d’émissions de CO2 et N2O par le sol, en discriminant de façon précise les différents types de couverts végétaux et
les différentes méthodes de destruction. Les 2 modèles ont montré une diminution des émissions de CO2 et N2O dans les stratégies “couverts couchés” par rapport à celles avec couverts enfouis en engrais verts. - Les expérimentations conduites en zone méditerranéenne ont montré que le potentiel des systèmes de production de légumes bio pour stocker du carbone dans les sols dépendait des processus d’humification-minéralisation, qui dépendent eux-mêmes fortement de la stratégie de destruction des couverts. Par ailleurs, les simulations n’ont pas mis en évidence de différence de pertes d’oxyde nitreux et de volatilisation d’ammoniaque entre les modalités, avec travail du sol ou non.
Grâce aux travaux conduits jusqu’à présent, les équipes de recherche impliquées dans le projet SoilVeg accroissent progressivement leur expertise sur la mise en oeuvre d’un système de production de légumes sans travail du sol. Dans tous les pays impliqués, les chercheurs et les agriculteurs participent à un processus d’amélioration continu, en partageant les expériences sur l’utilisation de rouleaux cranteurs pour détruire les couverts végétaux et les façons d’implanter les cultures.
Les premiers résultats obtenus sont parfois contrastés et dépendent comme prévu fortement des conditions de sol et climat locales. Néanmoins, nous pensons que Soilveg permettra d’identifier - site par site - les principales contraintes des systèmes sans travail du sol basés sur l’utilisation d’un rouleau cranteur. Les équipes de recherche travaillent pour adapter la technique au niveau local, en améliorant ses performances techniques et environnementales, tout en atténuant ses impacts sur la réduction des rendements voire de la qualité des légumes.